Usurpation d’identité : l’affaire Guédou, DG de la MATCA, révèle comment un non-Ivoirien a dirigé une institution nationale grâce à de faux papiers
Usurpation d’identité : l’affaire Guédou, DG de la MATCA, révèle comment un non-Ivoirien a dirigé une institution nationale grâce à de faux papiers, mettant en lumière les failles de l’administration ivoirienne

Abidjan, 17 avril 2025 — Dans un pays où l’on peut naître à Grand-Bassam le matin, à Itahoroko l’après-midi, et changer de mère entre deux signatures, l’affaire Guédou Élie Ousmane n’est qu’un épisode de plus dans la série à succès : « Nationalité ivoirienne, mode d’emploi ».
Pendant plus d’une décennie, Guédou Élie Ousmane a dirigé la Mutuelle d’assurance des taxis-compteurs d’Abidjan (MATCA), arborant fièrement une identité ivoirienne obtenue grâce à un jugement supplétif d’acte de naissance en 2007. Ce document, bien que non enregistré dans les registres officiels, lui a permis d’obtenir une attestation d’identité, un certificat de nationalité en 2007 et une carte nationale d’identité en 2009. Grâce à cette nouvelle identité, il a accédé à la direction de la MATCA.



Le plus impressionnant ? La capacité de Guédou à jongler avec les identités : né à Itahoroko au Bénin selon certains documents, puis à Grand-Bassam en Côte d’Ivoire selon d’autres, avec des mères différentes selon les actes. Un véritable caméléon administratif.
Mais ne blâmons pas uniquement Guédou. Il a simplement exploité les failles d’un système où la vérification des documents semble être une option, et où les postes à responsabilité peuvent être obtenus avec une simple modification d’identité.
Face à cette situation, les autorités ont décidé de réagir. Le 16 avril 2025, Guédou a été interpellé par la police nationale avec l’appui du pôle pénal économique et financier. Le même jour, le conseil d’administration de la MATCA a été dissous, suite aux nombreuses plaintes émanant de sociétaires dénonçant des malversations dans la gestion de la mutuelle.
En attendant, la question demeure : combien d’autres Guédou Élie Ousmane occupent actuellement des postes clés grâce à des identités fabriquées ?
Dans ce contexte, la nationalité ivoirienne semble être devenue un simple accessoire de bureau, disponible au besoin, sans grande valeur.
L’affaire Guédou Élie Ousmane met en lumière un problème structurel en Côte d’Ivoire : la facilité avec laquelle certains individus parviennent à usurper la nationalité ivoirienne pour accéder à des postes stratégiques. Ce cas n’est pas isolé. Des rapports indiquent que d’autres individus, notamment des Libanais et des migrants, ont exploité des failles similaires pour obtenir la nationalité ivoirienne. Des documents falsifiés, des complicités au sein de l’administration et des contrôles laxistes ont contribué à cette situation.
Face à ces révélations, les autorités ivoiriennes sont confrontées à la nécessité urgente de renforcer la sécurité des documents d’identité et de mettre en place des enquêtes de moralité rigoureuses pour les aspirants à des fonctions sensibles. L’arrestation de Guédou Élie pourrait marquer un tournant dans la lutte contre les fraudes à la nationalité, mettant fin à une ère d’impunité et de complaisance.
JACQUES ROGER
