Présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire : un pouvoir sans adversaire ?
Présidentielle 2025 en Côte d’Ivoire : un pouvoir sans adversaire ?

Par Jacques Roger – Afrique2050
À sept mois de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, un constat s’impose : Alassane Ouattara semble déterminé à concourir, mais à une seule condition — sans adversaires réellement représentatifs en face.
L’affaire Tidjane Thiam, que d’aucuns qualifient déjà de tentative de disqualification politique, révèle l’obsession du pouvoir pour une élection contrôlée, verrouillée, neutralisée. Depuis des mois, les Ivoiriens assistent à une mise en scène inquiétante : refus de rencontre, manœuvres administratives autour de la nationalité, crispation autour de simples déclarations publiques. Tout indique que le camp présidentiel redoute une confrontation démocratique avec celui qui incarne aujourd’hui un profond espoir de renouvellement pour une partie de la population.

Dans un article publié le 2 avril 2025, Africa Intelligence révèle que le président Emmanuel Macron et l’ancien président sénégalais Macky Sall ont eu plusieurs échanges confidentiels visant à dissuader Alassane Ouattara d’écarter la candidature de Tidjane Thiam. Selon le média, Macky Sall s’est même rendu discrètement à Mougins, dans la résidence française de Ouattara, pour lui transmettre les recommandations françaises en faveur d’un scrutin inclusif. Mais la réaction du président ivoirien a été sans équivoque : gêne manifeste, refus de s’engager, irritation contenue.
Pourquoi tant de crispation autour d’un homme, si ce dernier ne représentait aucune menace politique réelle ? Pourquoi Ouattara refuse-t-il de le recevoir depuis plus d’un an ? Pourquoi, malgré les interventions de partenaires internationaux, persiste-t-il à vouloir tenir à distance un opposant qu’il sait redouté ? Tout cela ne peut s’expliquer que par une volonté délibérée de disputer une élection sans compétition sérieuse.

En 2020 déjà, Laurent Gbagbo et Guillaume Soro avaient été tenus à l’écart du scrutin. En 2025, le même schéma semble se répéter avec Tidjane Thiam. Un triptyque se dessine : disqualification des figures fortes, instrumentalisation des institutions, et triomphalisme sur fond de démocratie affaiblie.
Mais qu’est-ce qu’une victoire sans adversaires crédibles ? Un simulacre.
Si Alassane Ouattara est si sûr de son bilan, qu’il le défende devant les urnes face à ceux qui contestent sa vision. Écarter par la procédure ce que l’on craint par la légitimité, c’est reconnaître sa faiblesse politique.
Source : Africa Intelligence, “Présidentielle : le cas Tidjane Thiam met Alassane Ouattara sous pression”, 2 avril 2025.




Et puis, au fond, pourquoi se donner tant de peine ? Pourquoi s’en remettre aux institutions, aux textes, au Conseil constitutionnel, quand un seul homme peut décider, dans le calme feutré de sa résidence de Mougins, qui est digne ou non de participer à l’élection présidentielle ?
À quoi bon les procédures, les recours et les garanties républicaines, si le véritable juge de la validité des candidatures s’appelle Alassane Ouattara ?
Ironie du sort : en Côte d’Ivoire, ce n’est peut-être pas le Conseil constitutionnel qui trie les dossiers… mais bel et bien le président sortant lui-même, selon son humeur, ses calculs et ses colères. À ce rythme, autant publier la liste officielle des candidats directement depuis sa résidence secondaire. Cela fera gagner du temps — et un peu de suspense en moins pour les électeurs.
JACQUES ROGER
LECONSERVATEUR