NATIONALITÉ ET DROIT IVOIRIEN : UNE CLARIFICATION NÉCESSAIRE
NATIONALITÉ ET DROIT : UNE CLARIFICATION NÉCESSAIRE

La question de la perte de la nationalité ivoirienne suscite de nombreuses interprétations, parfois erronées, dans le débat politique actuel. Pourtant, le Code de la nationalité ivoirienne est clair sur ce point :
1- La perte de la nationalité ivoirienne doit être constatée soit par un décret (articles 72 et 73 du Code de la nationalité), soit par une décision judiciaire (article 77 et suivants du même Code). À défaut de l’un ou l’autre, la nationalité ivoirienne demeure acquise, même en cas d’acquisition volontaire d’une autre nationalité.
2- L’article 78 du Code de la nationalité précise que seule la juridiction civile de droit commun est compétente pour statuer sur une question de nationalité, excluant ainsi toute autre juridiction, y compris le Conseil constitutionnel. Si une juridiction autre que celle de droit commun est saisie d’une telle question, elle doit suspendre son examen et renvoyer l’affaire à la juridiction compétente (articles 81 et suivants).
Conséquences de ces dispositions :
- Erreur du Conseil constitutionnel
En se prononçant directement sur la perte de nationalité d’un citoyen, le Conseil constitutionnel a outrepassé ses prérogatives, alors qu’aucune juridiction civile de droit commun ne s’était encore prononcée. Cette décision est donc juridiquement contestable.
- Le citoyen demeure ivoirien en l’absence de décret ou de décision judiciaire
Si aucun décret présidentiel ou décision judiciaire définitive n’a été rendu, le citoyen concerné conserve sa nationalité ivoirienne, même si l’on estime qu’il remplit les conditions d’une perte de nationalité.
- Un risque d’apatridie en contradiction avec les conventions internationales
Si un Ivoirien concerné par une perte de nationalité renonce à sa nationalité étrangère avant qu’un décret ou une décision judiciaire définitive n’intervienne, il deviendrait apatride, ce qui est interdit par les conventions internationales ratifiées par la Côte d’Ivoire. Par conséquent, dans un tel cas, il conserverait automatiquement sa nationalité ivoirienne.
En résumé :
Toute tentative d’exclure un citoyen de ses droits civiques sur la base d’une perte de nationalité doit strictement respecter la procédure légale, sous peine d’être arbitraire et contestable. En l’absence d’un décret ou d’une décision judiciaire, toute personne mise en cause demeure ivoirienne de plein droit, quelles que soient les interprétations politiques ou administratives.
Un débat juridique qui mérite d’être mené dans le strict respect du droit et des principes fondamentaux de justice. LE JURISTE A. K.
JACQUES ROGER
