NATION – Dans le cœur des Ivoiriens : Entre frustrations, quête de nationalisme et espoirs silencieux
Dans le cœur des Ivoiriens : Entre frustrations, quête de nationalisme et espoirs silencieux

À travers une enquête menée au cœur de la Côte d’Ivoire, entre marchés animés, quartiers populaires et villages reculés, une vérité émerge : les Ivoiriens sont divisés, mais unis dans leurs attentes d’un changement profond. Si les partisans d’Alassane Ouattara continuent de défendre son bilan, notamment dans le nord et au sein des communautés étrangères, une majorité silencieuse, laissée pour compte, observe avec une impatience grandissante, attendant l’heure de faire entendre un ras-le-bol étouffé depuis trop longtemps.
Les bénéficiaires du système : un soutien pragmatique à Ouattara
Pour les partisans d’Alassane Ouattara, souvent issus du nord du pays ou de populations d’origine étrangère, le maintien du président au pouvoir est perçu comme une garantie de stabilité économique. “Le port de nos boubous dépend de lui”, confient-ils, exprimant une dépendance qui dépasse la simple politique pour s’inscrire dans la survie économique. Ce soutien s’apparente plus à une crainte de l’inconnu qu’à une réelle adhésion à son projet de société.
Cependant, cette dépendance soulève des questions parmi ceux qui n’ont pas bénéficié des retombées économiques. Après près de quinze ans de gestion, une partie importante de la population voit dans ce système un modèle inéquitable, réservé à une élite restreinte, et observe avec frustration une croissance économique qui n’améliore pas leur quotidien.

Une majorité silencieuse à bout de souffle
Cette majorité silencieuse, pour qui l’amélioration de l’indice de développement humain (IDH) reste un mirage, nourrit une méfiance profonde envers le pouvoir actuel et ses éventuelles “copies”. Ces citoyens, exclus des cercles privilégiés, restent sceptiques face à l’émergence d’un autre leader issu du même moule que Ouattara. Ils craignent que le changement promis ne soit qu’un retour déguisé au statu quo.
Un désaveu venu de l’intérieur : Amon Tanoh brise le silence
En 2020, Amon Tanoh, ancien proche collaborateur d’Alassane Ouattara et membre influent du RHDP, avait marqué les esprits en dénonçant ouvertement le régime qu’il avait soutenu pendant des années. Dans une déclaration forte, il avait affirmé :
« Un peuple ne peut accepter ce que Ouattara fait aux Ivoiriens. Le peuple est fatigué de la dictature de Ouattara et nous sommes prêts, à mourir, pour la Côte d’Ivoire. »
Ces propos résonnent encore aujourd’hui comme un cri d’alarme contre un pouvoir accusé de dérives autoritaires. Par cette prise de position, Amon Tanoh traduisait non seulement son désaveu du régime Ouattara, mais aussi une volonté d’incarner un combat pour une Côte d’Ivoire qu’il considérait plus juste et démocratique. Ce sentiment de rejet est aujourd’hui largement partagé par une masse silencieuse, qui attend son heure pour s’exprimer.
Tidjane Thiam : espoir ou continuité déguisée ?
Au cœur des discussions, un nom revient fréquemment : Tidjane Thiam. À la tête du PDCI-RDA, son élection a suscité autant d’espoirs que de doutes. Pour une partie de la population, son parcours international de 23 ans, son élection controversée à la tête du parti, et même son nom sont perçus comme des éléments le rapprochant d’une élite occidentale déconnectée des réalités ivoiriennes. Ces perceptions, alimentées par des campagnes de désinformation orchestrées par ses détracteurs, le présentent comme une version “moderne” d’Alassane Ouattara, un “valet de l’Occident” prêt à perpétuer le système actuel.
Cependant, ces critiques sont souvent dénuées de fondements solides. Privé d’un temps d’antenne suffisant pour expliquer son projet et son positionnement, Tidjane Thiam n’a pas encore eu l’occasion de parler directement aux Ivoiriens, “les yeux dans les yeux”, pour dissiper les malentendus et affirmer sa vision. Ce déficit de proximité et de communication constitue l’un de ses plus grands défis.

Un chemin périlleux mais porteur d’espoir
Pour Tidjane Thiam, le défi est clair : se démarquer de l’héritage Ouattara tout en répondant aux attentes d’un peuple en quête d’un nationaliste authentique. Ce chemin, bien que semé d’embûches, n’est pas insurmontable. Il devra non seulement briser les clichés qui l’entourent, mais aussi prouver son engagement à partager le quotidien des Ivoiriens, symboliquement représenté par le geste de “manger l’attiéké ivoirien” avec eux. Cet acte, bien qu’anodin en apparence, pourrait marquer une rupture significative avec l’image d’élite déconnectée qui lui est associée.
Pour y parvenir, Thiam devra adopter une approche transparente et inclusive, expliquer son parcours, et proposer un projet politique novateur, aligné sur les aspirations des Ivoiriens. Il devra également dénoncer fermement les manipulations qui cherchent à le discréditer, tout en se rapprochant des populations à travers des actions concrètes et symboliques.
Conclusion : Le tournant décisif de la Côte d’Ivoire
La Côte d’Ivoire se trouve à un carrefour historique. D’un côté, un système qui a profité à une minorité mais laissé une majorité silencieuse dans l’ombre. De l’autre, des attentes croissantes pour un changement véritable et un nationalisme inclusif. Amon Tanoh a ouvert une brèche en dénonçant les dérives du régime Ouattara, exprimant un ras-le-bol latent. Tidjane Thiam, bien qu’il suscite encore des interrogations, a l’opportunité unique de s’imposer comme une alternative crédible.
Le succès de cette démarche dépendra de sa capacité à transformer la méfiance en confiance, à engager un dialogue sincère avec les Ivoiriens, et à incarner un projet qui répond aux aspirations d’un peuple en quête de justice, d’équité, et de développement. Le chemin est périlleux, mais avec courage et authenticité, il pourrait bien tracer une voie nouvelle pour une Côte d’Ivoire réconciliée et tournée vers l’avenir.

NANAN APPINDRIN
ABIDJAN POUR AFRIQUE2050
BIDBA (Bring 🇨🇮 Dream Back Again) – Ensemble, redonnons vie au rêve ivoirien !