Guinée : Quand l’humanité triomphe enfin de la haine, de la vengeance et de la peur d’un adversaire sérieux
Guinée : Quand l’humanité triomphe enfin de la haine, de la vengeance et de la peur d’un adversaire sérieux

L’actualité guinéenne vient de franchir un tournant significatif en matière de justice et d’humanité. La décision de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF) d’autoriser le transfert de l’ancien Premier ministre Ibrahim Kassory Fofana vers un centre hospitalier spécialisé, afin de garantir une prise en charge médicale adaptée, marque un moment de bascule dans un contexte où l’empathie a souvent été supplantée par des intérêts politiques et des considérations de revanche.
Un triomphe tardif mais nécessaire de la dignité humaine
Depuis plusieurs mois, la détention prolongée de Kassory Fofana, malgré la dégradation de son état de santé, était devenue un symbole des dérives d’un système judiciaire en quête de crédibilité. Cette décision, bien que tardive, révèle un pas dans la bonne direction, celui de la primauté de l’humanité sur la vengeance politique.
En examinant les rapports médicaux alarmants présentés par des experts reconnus, la CRIEF a, pour une fois, fait preuve d’une approche qui place la dignité humaine au-dessus des calculs politiciens. Les diagnostics clairs – une lésion liée à un adénome à risque de cancer et des complications nécessitant des investigations urgentes – laissaient peu de place à la tergiversation.
Un message fort pour la justice guinéenne
Cette décision intervient dans un contexte où la Guinée, souvent accusée de basculer vers une justice de règlement de comptes, est scrutée par la communauté internationale. Il ne s’agit pas simplement d’un cas médical, mais d’un test grandeur nature pour une institution judiciaire en quête de légitimité. En acceptant enfin de traiter Kassory Fofana comme un être humain avant de le considérer comme un prévenu, la CRIEF envoie un message clair : la justice guinéenne peut se montrer impartiale et respectueuse des droits fondamentaux.
Toutefois, cette évolution ne doit pas masquer les failles du système. Si cette décision est saluée, elle soulève des questions fondamentales : combien d’autres détenus, moins célèbres et moins médiatisés, souffrent en silence dans des prisons sans accès à des soins adéquats ? La justice guinéenne sera-t-elle capable de généraliser cette approche humaniste ou s’agit-il d’une exception dictée par des pressions internes et externes ?
La peur de l’adversaire sérieux : une entrave au progrès
Dans un pays où la politique est souvent un champ de bataille sans merci, la peur d’un adversaire sérieux comme Kassory Fofana a longtemps paralysé toute objectivité. L’acharnement judiciaire dont il a été victime n’est pas sans rappeler les méthodes employées pour neutraliser des figures politiques perçues comme menaçantes pour le statu quo. Pourtant, cette décision montre que même dans un climat hostile, il est possible de dépasser les instincts primaires de vengeance pour rétablir un semblant d’équilibre.
Un appel à une justice véritablement indépendante
La Guinée a aujourd’hui une opportunité unique : transformer cet acte ponctuel en un jalon vers une réforme plus profonde de son système judiciaire. La justice ne doit pas être un outil au service du pouvoir en place, mais un pilier de la société, impartial et respectueux des droits de tous, y compris des opposants politiques.
Alors que Kassory Fofana s’apprête à recevoir les soins nécessaires, la CRIEF a l’occasion de démontrer que cette décision n’est pas une exception mais le début d’un changement structurel. En renvoyant l’affaire au 6 janvier 2025, la Cour a également une responsabilité : garantir que la santé et la dignité de l’ancien Premier ministre ne soient pas utilisées comme une monnaie d’échange dans des jeux politiques.
L’avenir de la Guinée en jeu
Plus que jamais, la Guinée est à un carrefour historique. En choisissant l’humanité et la justice équitable, le pays peut amorcer une véritable réconciliation nationale. Car une justice digne de ce nom ne se construit pas sur la haine, la peur ou la vengeance, mais sur la recherche de la vérité et le respect des droits humains.
Si cette décision marque un moment de lucidité, elle ne doit pas être un simple sursis humanitaire, mais un point de départ pour une justice guinéenne plus juste, plus humaine et plus respectueuse des principes universels. Aujourd’hui, en Guinée, l’humanité a gagné une bataille importante. Mais la guerre pour une justice véritablement indépendante reste à mener.
Le Bon vivant Don Kass mérite la vie, pas la mort. Il a bon cœur.
JACQUES ROGER
