TCHAD – Le Tchad rompt avec la France : un tournant historique pour l’affirmation de sa souveraineté.
Tchad – France
Le Gouvernement de la République du Tchad informe l’opinion nationale et internationale de sa décision de mettre fin à l’accord de coopération en matière de défense signé avec la République française révisé date du 5 septembre 2019, visant à renforcer la coopération en matière de sécurité et de défense entre les deux nations
Le Gouvernement de la République du Tchad informe l’opinion nationale et internationale de sa décision de mettre fin à l’accord de coopération en matière de défense signé avec la République française révisé date du 5 septembre 2019, visant à renforcer la coopération en matière de sécurité et de défense entre les deux nations.
Cette décision, prise après une analyse approfondie, marque un tournant historique. En effet, après 66 ans de la proclamation de la république du Tchad, il est temps pour le Tchad d’affirmer sa souveraineté pleine et entière, et de redéfinir ses partenariats stratégiques selon les priorités nationales.
Le Tchad, conformément aux dispositions de l’accord, s’engage à respecter les modalités prévues pour sa résiliation, y compris le délai de préavis, et à collaborer avec les autorités françaises afin d’assurer une transition harmonieuse.
(ABDERAMAN KOULAMALLAH)
Analyse de la décision du Tchad de mettre fin à l’accord de coopération en matière de défense avec la France
La décision du gouvernement tchadien de mettre fin à l’accord de coopération en matière de défense avec la France représente un tournant significatif dans les relations bilatérales entre les deux pays, marquant une volonté affichée de réaffirmer la souveraineté nationale et de redéfinir les priorités stratégiques du Tchad.
1. Une décision souveraine et symbolique
Le communiqué insiste sur le fait qu’après 66 ans d’indépendance, le Tchad souhaite consolider sa souveraineté. Ce type de rupture est souvent perçu comme une étape majeure dans l’émancipation des anciennes colonies de leurs anciennes puissances coloniales. Cela s’inscrit dans un contexte plus large de remise en question de la présence militaire française en Afrique par plusieurs pays (par exemple, le Mali, le Burkina Faso et le Niger). Cette décision traduit un désir de repositionner le Tchad dans un cadre où il contrôle pleinement ses choix stratégiques, en rupture avec les schémas hérités de la période postcoloniale.
2. Contexte sécuritaire et relations avec la France
L’accord de défense signé, révisé en 2019, visait à renforcer la coopération en matière de sécurité, un secteur crucial pour le Tchad, confronté à des menaces comme Boko Haram, l’instabilité au Sahel et les tensions au Soudan. Toutefois, l’efficacité des partenariats sécuritaires avec la France a été de plus en plus critiquée dans la région.
De nombreux observateurs estiment que ces accords favorisent souvent les intérêts stratégiques de la France au détriment de ceux des pays africains. En rompant cet accord, le Tchad pourrait chercher à diversifier ses partenaires stratégiques, en explorant des collaborations avec des puissances émergentes comme la Russie, la Chine, ou d’autres acteurs régionaux.
3. Une décision mesurée et stratégique
Le Tchad, tout en dénonçant l’accord, souligne son engagement à respecter les modalités prévues, y compris le délai de préavis. Cette approche évite une rupture brutale et permet une transition harmonieuse. Cette posture démontre une volonté de préserver une certaine stabilité et d’éviter les tensions inutiles, particulièrement dans un contexte régional déjà fragile.
4. Conséquences potentielles
• Sur le plan politique : Cette décision peut renforcer l’image du gouvernement tchadien comme un acteur affirmant son indépendance. Cela pourrait également susciter un sentiment nationaliste parmi la population, souvent critique de l’influence étrangère.
• Sur le plan sécuritaire : Le retrait éventuel du soutien militaire français pourrait poser des défis au Tchad, qui s’appuyait historiquement sur cette coopération pour faire face aux menaces régionales. Il faudra évaluer si les capacités nationales et les nouvelles alliances stratégiques suffiront à compenser cette perte.
• Sur le plan diplomatique : La France pourrait interpréter cette décision comme un signal de défiance, ce qui pourrait affecter d’autres domaines de coopération bilatérale (économie, développement, etc.). Néanmoins, cette rupture pourrait permettre au Tchad de négocier des accords plus équilibrés avec d’autres partenaires.
5. Une tendance régionale ?
Cette décision s’inscrit dans un mouvement régional où plusieurs pays africains rejettent la domination ou l’influence perçue de la France. Le Mali, le Burkina Faso, et plus récemment le Niger, ont déjà renoncé à des accords similaires, souvent dans un climat de tension ou après des coups d’État. Le cas du Tchad se distingue cependant par l’approche relativement apaisée et ordonnée adoptée pour cette résiliation.
Conclusion
La fin de l’accord de coopération de défense entre le Tchad et la France est un acte chargé de symbolisme, marquant une étape décisive dans la volonté du Tchad de réorienter ses alliances en fonction de ses intérêts stratégiques nationaux. Toutefois, ce choix implique des défis sécuritaires et diplomatiques que le gouvernement tchadien devra gérer avec précaution. La capacité du Tchad à naviguer efficacement dans ce nouveau contexte déterminera le succès de cette affirmation de souveraineté.
JACQUES ROGER